Résurgence de souvenirs... si forts !!! Par Y. Demarque.

Résurgence de souvenirs... Si forts !!!!

Yaqov Demarque

On était fin des années soixante. J’avais une douzaine d’années, et j’entrais dans une phase d’adolescence qui allait s’avérer difficile et chaotique….

Mon père, chasseur, avait un garde forestier qui surveillait son territoire de chasse. Un garde, et un ami, surtout ! Ce dernier était le père d’une nombreuse famille de treize enfants ! Il était aussi le fils d’un bien étrange personnage, le « Père L. ». Tour à tour « Poilu » durant la première guerre mondiale, douanier, gendarme à cheval, antiquaire, contrebandier de tabac et de café, érudit aussi, qui connaissait comme sa poche l’histoire celtique puis gallo-romaine de sa région.

Il habitait une grosse bâtisse isolée, le long de l’ancienne route qui va de Chassepierre à Florenville. Pas d’eau courante, pas de gaz, ni d’électricité !

Le Père L. me fascinait, comme je crois qu’il fascinait mon père !

J’ai vu chez lui des toiles prestigieuses, de l’Ecole de Rembrandt et de celle de Rubens ! Des vestiges fascinants aussi du passé gallo-romain de cette région si riche de la Gaume : je me souviens d’avoir tenu en mains une coupe en or, qui venait d’un cimetière gallo-romain qu’il avait découvert, à la « barrière des quatre arbres ». Cimetière ou j’ai moi-même, adolescent, participé à des fouilles vraiment très fructueuses ! Il avait aussi découvert une tombe à char, de l’époque Celtique, et bien d’autres sites, comme celui du Dolmen d’Azy, qui livra de superbe vestiges, et notamment une magnifique hache de silex poli !

Le Père L. était aussi facétieux, et bien des gens de la région se souviennent aujourd’hui encore du canular qu’il avait monté, fin des années cinquante, pour faire croire que les… Martiens avaient débarqué à Chassepierre !!!!  Il fut suivi par toute la presse régionale, et même par la presse nationale belge !!!

De lui aussi, j’avais reçu, en cadeau de « Communion Solennelle », une toile de César de Cock, peintre flamand qui appartenait à l’Ecole de Barbizon…..

Le Père L a compté beaucoup dans ma vie, et il ma laissé ma passion pour l’archéologie, passion que je n’ai pu assouvir au bon moment, lorsque j’étais « jeune », car mes parents disaient qu’il n’y avait aucune sécurité dans la profession d’archéologue ! … Je me suis bien « vengé » depuis, je crois ! Et mon option, à trente sept ans, pour entamer des études universitaires de théologie protestante était je le crois, dans le droit fil de cette « vocation avortée » : juste, je me suis trompé de cible, même si après mon Master en Théologie, j’ai entamé un DES en Orientalisme, avec option « Egyptologie », comme pour combler un manque actuellement encore inassouvi…

Il y a quinze jours exactement, Jo et moi faisions courir notre jeune Braque « Dundee » sur un champ récemment fauché, dans les contreforts de la cité de Rabat, à Malte, un haut lieu d’histoire et d’archéologie…

Tout de suite, j’ai remarqué que le sol était jonché de tessons de poterie, de fragments de verre antique et de déchets de fonte de verrerie. Je me suis senti comme transporté dans mon passé, à l’époque de mon adolescence et des fascinantes histoires du Père L. !

Jo était très amusée de me voir ramasser des tessons, et elle s’y est même mise avec moi !

Ce soir, quinze jours après, j’ai examiné mes trouvailles….

Il y a parmi elles des vestiges d’époque romaine (Rabat fut un centre important et a laissé des traces exceptionnelles, comme une villa et un hypogée.) mais aussi plus anciens, sans doute datant du néolithique, à en juger par la texture et la décoration des céramiques.

J’ai hâte d’acquérir une bonne boussole et une bonne carte IGN, si possible au 10.000 ème, et de pouvoir continuer mes « fouilles ».

Bon, OK, c’est interdit, mais après tout je ne fais que ramasser des fragments en surface, et, peut-être, cela permettra par la suite d’aller plus loin… Encore que ce soit ici très difficile : le « site » se trouve au beau milieu de champs cultivés ! Et les fermiers maltais sont extrèmement jaloux de leurs terres arables, si rares sur l’ile ! Ils craignent (à raison !) une main-mise du Gouvernement sur leurs biens, en cas de découverte archéologique même mineure…

Je peux donc y aller, juste, en « stoemmeling », comme on dit en Bruxellois !

Mais j’irai, et vous tiendrai informé, avec passion et plaisir !