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jeudi 23 octobre 2014

L'exil des peuples : étape à Malte

L'exil des peuples : étape à Malte 



(ré)écouter cette émission  disponible jusqu’au 18/07/2017 07h43


L'un des nombreux camps ouverts aux migrants à Malte © Radio France / J-MPORCHER

Après l’Ethiopie, nous partons a Malte.. 300 kilometres carrés au milieu de la méditerranée.. Au nord de la Libye, au sud de la sicile : l’une des portes d’entrée de l’europe pour les migrants... Depuis le début de l’année, 580 personnes sont arrivées sur l’ile, et on a compté jusqu'à 2000 réfugiés en 2013...

Au nord de la Libye, au sud de la Sicile, se trouve sur l’ile de Malte l’une des portes d’entrée de l’Europe pour les migrants. Depuis le début de l’année, 580 personnes sont arrivées sur l’ile. En 2013, on en a compté jusqu'à 2000 réfugiés en 2013. Mohammed a 22 ans. Il porte un catogan son regard se perd. Il vit dans la rue, à La Valette. Dans une autre vie, Mohammed faisait des études d’ingénieur en Syrie. Puis il a fui en 2012, à cause de la guerre, en donnant 1.500 dollars à un passeur libyen.


Deux cent cinquante personnes sont mortes. Les premières étaient les femmes et les enfants


Il raconte : "On était 400, sur un petit bateau… Trois heures après le départ, la milice est arrivée et ils ont tiré sur le bateau. On a nagé deux ou trois heures. J’ai essayé de chercher un de mes amis, mais je n’ai pas pu le trouver. Deux cent cinquante personnes sont mortes. Les premières étaient les femmes et les enfants. Quand les Maltais sont arrivés j’ai essayé de nager, ils m’ont sauvé. Et puis ils m’ont mis en prison."


Ils sont venus en disant qu’ils l’emmenaient à l’hôpital, mais à la place ils l’ont emmené au poste de police


Mohammed passera six mois, derrière les barreaux. La détention peut durer jusqu'à un an et demi. Le système carcéral maltais est l’un des plus sévères d’Europe. Il poursuit : "La police est arrivée, ils ont confisqué la nourriture et les boissons, on n’a pas eu le droit de manger ni de boire. Après une semaine il y a quelqu’un qui est tombé malade, parce qu’on ne peut pas résister une semaine sans manger et sans boire. Ils sont venus en disant qu’ils l’emmenaient à l’hôpital, mais à la place ils l’ont emmené au poste de police."
Au centre de Marsa, quelque 300 résidents

Après plusieurs semaines de négociations, l’agence de l’immigration nous a ouvert les portes de l’un des centres d’accueil ouvert à Marsa, une ancienne école près d’une partie désaffectée du port où sont hébergés ceux qui viennent d’être libérés. Olivier Gatt est le directeur des opérations du centre, qui accueille environ 300 résidents. Il assure qu’ici, "n’importe quelle personne qui a des besoins qui concernent son bien être peut venir et trouve l’aide dont il a besoin".

A quelques mètres dans un bureau, l’un des résidents est assis face à une assistante sociale. Il explique : "Ici on aide les résidents à trouver un travail, à faire un CV, pour le secteur du bâtiment ou le nettoyage, ça dépend. Je suis ici depuis bientôt deux ans… Ils essaient de faire en sorte que j’aie un travail. Si j’arrive à trouver quelque chose, je veux m’installer et vivre ici à Malte."

Entre vingt et trente dans la même pièce !

Dans la foulée, le directeur du centre explique que les réfugiés reçoivent 130 euros par mois, qu’ils ont du wifi pour contacter leurs familles, un café avec la télévision. Difficile pourtant de les rencontrer. En passant devant un dortoir, Ibrahim et Hatum nous font signe de nous approcher : "Venez, venez par ici… Regardez les banquettes, regardez cet endroit ! Moi, ils m’ont mis en prison. Au bout de huit mois, ils m’ont laissé sortir et je suis arrivé ici. Vous voyez ?! C’est pareil pour tout le monde : on est entre 20 et 30 dans la même pièce, il fait trop chaud, on se sent mal tout le temps."

Violation des droits de l’homme

Ce retour forcé à Malte, cette impossibilité de quitter l’ile, beaucoup de réfugiés y sont confrontés. Parce que c’est ce que prévoit la législation européenne, qui établit que chaque réfugié dépend, pour sa demande d’asile, du premier pays dans lequel il arrive. Inacceptable pour le gouvernement maltais qui demande à l’Europe de prendre ses responsabilités. Et justifie du coup, sa politique de détention. Une politique dénoncée pourtant par une partie des acteurs sociaux, comme la sociologue Maria Pisani : "De mon point de vue, la politique de détention n’a aucun sens. C’est une violation des droits de l’homme, c’est cher, ca mène au racisme, mais ca continue. Parce qu’aucun parti politique ne sera jamais encensé ou récompensé parce qu’il aura supprimé la détention. Tout passe par les urnes et les votes. Et le réfugiés n’ont pas le droit de vote…"

"Sans somnifère, je n’y arrive pas. Ici, on ne m’aime pas, alors je parle aux murs, je parle aux chats, je parle à la mer. J’ai 22 ans et mon avenir n’existe pas"


Ces réfugiés sont d’ailleurs de plus en plus jeunes : un sur quatre est mineur, souvent victimes de troubles psychologiques. Lorsque sonne 22h00 au centre de Malte Mohammed, le Syrien, cherche comme tous les soirs un parc où dormir : "Sans somnifère, je n’y arrive pas. Ici, on ne m’aime pas, alors je parle aux murs, je parle aux chats, je parle à la mer. J’ai 22 ans et mon avenir n’existe pas."

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